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Comment éviter la couverture unidimensionnelle de la Fierté en explorant l’intersectionnalité

Anna-Liza Badaloo
Pour La Guilde et SCA Canada

En tant que membre PANDC (personne autochtone, noire et de couleur) au sein de la communauté LGBTQAI2S+, je connais trop bien les difficultés qui accompagnent ces identités entrecroisées.

L’intersectionnalité reconnaît que nous avons tous des identités multiples qui se chevauchent et se superposent pour créer des strates de discrimination complexes.

Cette année, les organismes de la Fierté intensifient leur programmation intersectionnelle afin de présenter diverses histoires de la communauté. Il est temps que les médias cessent de mettre l’accent sur les histoires des Blancs, des cis, des homosexuels et qu’ils diversifient la discussion.

Je me suis réunie virtuellement avec des organisateurs de la Fierté de partout au Canada pour comprendre pourquoi une approche intersectionnelle à la couverture médiatique est essentielle pendant le Mois de la Fierté et comment les médias peuvent sensibiliser la population aux enjeux importants auxquels fait face la communauté allosexuelle.

Pourquoi une approche intersectionnelle à la couverture médiatique est-elle capitale à l’heure actuelle?

En mettant sur pied divers groupes consultatifs et en participant à des consultations communautaires, les organismes de la Fierté travaillent fort pour s’assurer que leurs programmes reflètent les collectivités qu’ils desservent. Les artistes allosexuels sensibilisent les gens au lien qui existe entre le non-conformisme sexuel et la race, la classe sociale, la capacité, la taille, l’âge, la religion et le statut d’immigrant.

Mais vous ne pourriez pas l’apprendre en vous fondant sur la couverture médiatique générale.

Comme le fait remarquer Sherwin Modeste, directeur exécutif de Pride Toronto, « l’époque d’une Fierté blanche, gaie et masculine est révolue. Regardez l’histoire de la Fierté; elle témoigne d’un niveau d’intersectionnalité dont nous ne parlons pas souvent. Les femmes trans de couleur ont réalisé un travail considérable au début. »

« Les médias aiment faire la couverture des aspects voyants et colorés comme les drags », explique Andrea Arnot, directrice générale de la Vancouver Pride Society. « Ils doivent examiner ce que signifie avoir des identités entrecroisées. Comment cela se traduit-il pour les artistes? Nous avons besoin d’une couverture plus nuancée. »

« C’est bien beau de parler d’intersectionnalité, explique Sandy Duperval, porte-parole de Fierté Montréal. Mais tisser des liens avec une personne qui vous raconte son histoire et qui vous présente non seulement le mot, mais aussi la réalité, change toute la donne. »

Comment les médias peuvent changer le récit du Mois de la Fierté

La communauté allosexuelle compte de nombreuses histoires nuancées et intersectionnelles qui attendent que les médias grand public leur prêtent attention. Les organisateurs de la Fierté ont fait part de leurs conseils pour aider les médias à trouver, à prioriser et à amplifier cette diversité de voix.

Mettez en valeur la diversité de la communauté allosexuelle

Rien ne remplace la représentation communautaire. Après des décennies de couverture de la Fierté centrée majoritairement sur des hommes gais, blancs et amateurs de fête, les médias peuvent faire mieux.

« Les jeunes qui arrivent doivent se reconnaître dans tout ce que nous faisons. Les médias jouent un rôle crucial pour donner le ton de ces conversations », souligne Sherwin. « Trop souvent, les membres de la communauté ne sont pas reflétés positivement, voire pas du tout reflétés, dans les reportages des médias. S’ils ne s’y voient pas, ils ne se sentiront pas les bienvenus. »

Chaque année, pendant le Mois de la Fierté, on a tendance à interviewer les mêmes personnes. Diversifiez la liste de vos sources en faisant une analyse approfondie des programmes de la Fierté pour trouver des artistes intersectionnels et des membres de la collectivité. N’hésitez pas à dire aux personnes-ressources de la Fierté pour les médias que vous souhaitez souligner l’intersectionnalité de la Fierté. Elles vous mettront volontiers en contact avec les personnes-ressources pertinentes.

Révélez les histoires humaines derrière l’intersectionnalité

Il n’y a pas d’histoire unique qui puisse englober dans son intégralité la portée de l’intersectionnalité dans la communauté allosexuelle.

Comme le souligne Sandy : « Si je lis un article ou regarde une entrevue, je veux qu’on me présente un autre être humain, pas seulement un sujet brûlant. Je veux avoir l’assurance que les personnes qui en ont le plus besoin reçoivent l’attention, que leurs histoires sont racontées et qu’elles ne sont pas balayées sous le tapis. »

Les histoires personnelles des organisateurs de la Fierté sont des exemples percutants.

« En tant que femme noire d’origine haïtienne issue d’un milieu très religieux, mon intersectionnalité a entravé mon épanouissement en tant que personne », raconte Sandy. « Je ne suis pas moins Noire parce que je suis lesbienne. De même, je ne suis pas moins lesbienne parce que je suis Noire. Mais en grandissant, je ne savais pas comment être l’un sans m’éloigner de l’autre. »

« Et si je parlais de mon parcours depuis la Grenade, de mon installation au Canada et de ma vie dans le placard pendant de nombreuses années ? » réfléchit Sherwin. « Maintenant, je dirige l’un des plus grands festivals de la Fierté au monde. D’autres personnes peuvent me regarder et penser : “Moi aussi, je peux le faire!” »

Les médias doivent interviewer un large panel de membres de la communauté allosexuelle et adopter une approche humaniste.

Sensibilisez aux enjeux d’intersectionnalité de la communauté allosexuelle

La semaine dernière, un gai a été brutalement attaqué alors qu’il se détendait sur une plage de Toronto. Les personnes allosexuelles ne vivent pas en sécurité autant que les médias traditionnels voudraient nous le faire croire. Comment les médias peuvent-ils mettre à profit notre privilège pour dire la vérité aux personnes au pouvoir?

« Les médias doivent prendre le temps de comprendre les diverses luttes qui se tiennent dans notre collectivité, dit Sherwin. Par exemple, un article sur les effets de la COVID sur la communauté allosexuelle pourrait mettre en contraste les expériences d’un homme trans blanc né au Canada avec celles d’une nouvelle arrivante lesbienne, PANDC qui plus est.

« Si je suis musulman et allosexuel, je ne suis pas seulement une personne allosexuelle faisant face à l’homophobie, explique Sandy, je suis aussi une personne religieuse faisant face à l’islamophobie. Dès lors que nous parlons davantage de leurs histoires, nous commençons à bâtir un espace sécuritaire. »

En tant que médias, nous oublions parfois le pouvoir que nous avons d’apporter des changements sociaux positifs. À quoi ressemblera votre couverture de la Fierté cette année? Allez-vous vous concentrer sur le glamour superficiel ou amplifier les voix allosexuelles, intersectionnelles, qui sont souvent ignorées ou réduites au silence?

Anna-Liza Badaloo est rédactrice pigiste, traductrice de connaissances et perturbatrice de l’éducation. Elle explore les liens entre l’équité en matière de santé, la santé intégrée et la santé planétaire. Anna-Liza est membre du syndicat canadien des pigistes.

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