La valeur de l’information constitue l’un des points majeurs de l’avenir du journalisme. Quand personne ne voudra plus payer pour être informé, restera-t-il encore des gens pour produire du contenu?
Cette idée revient périodiquement, chaque fois que l’on sabre dans des services ou dans le budget des entreprises de presse. Les récentes compressions de 10 pour cent à Radio-Canada n’en sont que le plus récent exemple.
Histoire de financer leur entreprise autrement, certains groupes ont revu leurs méthodes. C’est le cas du Huffington Post qui compte sur un noyau très restreint de journalistes payés et de plusieurs collaborateurs blogueurs périphériques bénévoles.
L’idée était claire dès le début et a été répétée par Arianna Huffinton «Le blogue n’a rien à voir avec le journalisme professionnel, c’est l’expression de soi», disait-elle lors du lancement de son site à Montréal en février 2012.
Sauf que, même si l’entente initiale était claire, cela n’a pas empêché d’anciens collaborateurs à revenir sur cette idée du «don de soi», lorsque Huffington Post a été acheté par AOL au coût de 315 millions de dollars. Ceux qui ont enrichi la machine par leur contenu en sont venus à se dire «n’y a-t-il pas un petit peu de moi dans ces 315 millions»?
La chose s’est rendue en Cour fédérale à New York où le juge John Koeltl a tranché … en faveur de l’entreprise. Dès le départ, le Huffington Post avait annoncé ses couleurs : pas de rémunération pour les blogueurs qui profitent d’une visibilité.
Il s’agit donc d’une victoire pour l’entreprise de presse encore jeune, mais aussi d’une leçon pour les producteurs de contenu : donner c’est donner, en affaires, on ne revient pas sur sa parole. Par contre, manifestement, il existe encore des gens intéressés au contenu et qui sont prêts à payer des millions pour en profiter et l’exploiter. La gratuité ?
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Lise Millette est membre de la Guilde canadienne des médias et journaliste à La Presse Canadienne.