Une formation sur les syndicats à Harvard ? Ce bastion dispendieux et élitiste d’avocats, d’étudiants privilégiés et de futures vedettes de la politique ? Sceptique ? J’ai des nouvelles pour vous !
Harvard est très certainement l’université la plus riche au monde. Elle est aussi une des plus prestigieuses. Cette institution tire de la fierté de sa réputation d’être une source de réflexion, d’éducation et d’inspiration. Étant donné qu’elle véhicule cette philosophie, il n’est pas surprenant que cette université a développé un programme unique qui réunit des grands esprits qui examinent comment et pourquoi les syndicats sont devenus une voix si forte pour le changement. Le programme s’appelle Harvard Trade Union Program (Le programme syndical de Harvard) et il est conçu pour les individus qui sont actifs au sein de leur syndicat.
Tout comme les entreprises, les politiciens, les mécènes et les gens d’affaires, il y a des gens ordinaires qui ont changé le monde, de simples mortels qui ne sont pas considérés comme des génies, qui n’ont pas de comptes bancaires en Suisse ni de liens avec le vedettariat. Armés d’une conscience sociale et d’un idéalisme inébranlable, nous avons pris conscience très tôt qu’améliorer le monde dans lequel nous vivons pourrait être notre destinée, si nous adoptons une approche collective. Voilà ce qui fait la grande force des syndicats.
Malheureusement, lors de la centième session de ce remarquable programme, l’accent a été mis cette année sur les campagnes de destruction sans précédents contre cette force collective que sont les syndicats. Il est ironique de constater que ce courant de propagande antisyndicale provient des Etats-Unis, Terre de la liberté, et dans une moindre mesure, du Canada, de l’Australie et du Royaume-Uni. C’est là que monsieur Tout-le-monde commence à croire à l’idée qu’il faut reprocher à son voisin de gagner un peu plus d’argent ou d’avoir un régime de retraite.
Il y a une douzaine d’éminents professeurs permanents qui dispensent ce programme et qui proviennent des domaines du droit, de l’économie, du travail, de l’histoire et de la sociologie. Il y en a une douzaine d’autres qui sont d’Harvard et du MIT. Ceux-là viennent prêter main forte et un bassin d’une soixantaine d’intellectuels de renom et d’universitaires (comme Noam Chomsky) qui viennent rencontrer les participants pour faire part de leurs réflexions. Le coeur et l’âme de ce programme est une fougueuse Canadienne qui était jadis une militante néo-démocrate et ancienne présidente de ce parti politique en Colombie-Britannique. Aujourd’hui Elaine Bernard est professeure titulaire à Harvard mais elle appuie toujours aussi passionnément la cause des défavorisés. Elle croit toujours que seule la solidarité nous permettra de construire une société juste et équitable.
Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il est très inspirant de côtoyer des gens qui offrent autant de ressources intellectuelles. Mais il est aussi troublant d’entendre leur point de vue au sujet des temps troubles que nous vivons, de la nécessité de prendre la parole et de se défendre pour que les syndicats demeurent une force dans nos sociétés.
Il est désolant, voire déprimant, d’entendre leurs prédictions sur l’avenir, si nous ne faisons rien pour contrer cette campagne de dénigrement des syndicats. Si nous laissons les législateurs américains s’en prendre aux enseignants, aux infirmières et aux fonctionnaires, ce n’est qu’une question de temps avant que nos politiciens agissent de la même façon. En fait, un nouveau candidat fédéral conservateur d’une circonscription de l’est de Toronto et directeur de la Fédération canadienne des contribuables, Kevin Gaudet, a déclaré récemment au Whig Standard de Kingston que « nous avons besoin d’un Wisconsin de ce côté-ci de la frontière. » Il faisait référence à la législation antisyndicale draconienne de cet état américain qui a provoqué des manifestations animées.
Les temps difficiles vont se poursuivre et la reprise économique n’a pas lieu comme prévu. Il est ironique de constater que les banques, qui ont provoqué cette situation, ont récupéré presque toutes leurs pertes en profitant encore une fois des contribuables.
Les syndicats sont à la croisée des chemins. Ceux d’entre nous qui les aimons parce qu’ils sont une source d’espoir, d’inspiration, de justice, d’égalité, de respect et de dignité, doivent transmettre ce sentiment à d’autres. Nous devons continuer le travail qui a été amorcé par nos grands-parents. Il faut trouver des approches innovatrices de convaincre nos collègues que les syndicats sont plus pertinents que jamais, même pour les travailleurs des générations X, Y et les prochaines à venir. Nous voulons tous des milieux de travail où règnent l’équité et la justice, nous voulons tous un accès égal à de vrais emplois. Réalisons ce projet.
Carmel Smyth est la présidente nationale de la GCM. Vous pouvez la rejoindre au carmel@cmg.ca ou en composant le 1-800-465-4149 ou le 416-591-5333.