Peut-être plus que toute autre élection précédente, les élections fédérales en cours posent un défi aux travailleurs du secteur des médias. Notre instinct professionnel nous pousse vers l’inaction pendant une campagne électorale. Cette fois-ci, cependant, le gouvernement qui cherche à se faire réélire a créé un enjeu électoral au niveau des médias et de la culture en annonçant, un mois avant le déclenchement des élections, d’importantes compressions budgétaires dans le domaine des arts.
Pourquoi ces compressions sont-elles tellement importantes ? C’est tout autant à cause de la façon dont ces coupures ont été effectuées, et de leur motivation, que des compressions elles-mêmes. L’annonce du gouvernement ciblait deux de nos collègues des médias, Avi Lewis et Gwynne Dyer, en suggérant que leur travail était sans valeur. Cela nous a semblé être une tentative cynique de plaire à un segment particulier des électeurs. On ne peut pas accepter que le travail culturel et médiatique soit réduit d’une telle façon par des tactiques de campagne.
À l’occasion de cette élection, j’estime que nous devons être des électeurs actifs. Nous devons poser des questions claires à nos candidats – à la porte, dans les cafés, à l’occasion de forums politiques – et les convaincre que nous écoutons avec grand intérêt leurs réponses… ainsi que celles de leurs partis.
Renseignements utiles
La Guilde n’appuie pas de candidats ni de partis politiques, mais défend nos intérêts en tant que travailleurs du secteur des médias. Tel que nous l’avons fait en 2004 et en 2006, nous vous ferons parvenir notre analyse des positions des cinq principaux partis au niveau des enjeux culturels et médiatiques. Nous travaillons avec l’ACTRA et la Campagne pour la démocratisation des médias à élaborer des questionnaires à l’intention des partis. Entre-temps, voici quelques données à conserver à l’esprit :
• Les compressions récentes dans le domaine des arts s’élèvent à 45 millions $ et donnent suite à un « examen stratégique » qui a été réalisé à huis-clos. Les dépenses éliminées avaient été prévues dans le budget de cette année. La part du budget fédéral consacrée aux arts a diminué, malgré le fait que les Conservateurs prétendent avoir dépensé plus dans le domaine les arts que l’ancien gouvernement libéral.
• Les bulletins de nouvelles locales sont en déclin, au Canada, depuis presque vingt ans. En 1999, sous les Libéraux, les règlements nécessitant la diffusion de bulletins de nouvelles locales à la télé ont été éliminées. Des diffuseurs tels que Citytv et Global, ainsi que des journaux tels que la chaîne Sun de Quebecor, Canwest et Torstar, ont tous éliminé récemment des postes dans les salles de rédaction. L’un des exemples les plus récents est TQS, qui a obtenu l’approbation du CRTC de réduire considérablement les bulletins de nouvelles locales, en dépit de l’indignation publique. On a demandé à Josée Verner, la ministre du patrimoine, de renverser la décision et elle a choisi de ne rien faire.
• Le gouvernement actuel approche les médias parlementaires d’une façon très cavalière : il permet très peu d’accès aux ministres et se donne de plus en plus de pouvoir lors des conférences de la Tribune de la presse parlementaire.
• Après d’importantes compressions budgétaires effectuées au milieu des années 90 par l’ancien gouvernement libéral, Radio-Canada fait du surplace avec des subventions parlementaires qui n’augmentent pas au rythme de l’inflation. Par conséquent, le diffuseur public dépend de plus en plus des revenus commerciaux et n’est pas capable d’améliorer le service de la radio dans les régions mal desservies du pays. Tout récemment, et malgré un rapport endossé par tous les partis exhortant le gouvernement à signer une entente de financement à long terme avec Radio-Canada, le gouvernement a choisi de ne rien faire. Des doutes subsistent concernant les intentions des Conservateurs à l’endroit de CBC/Radio-Canada, surtout à la suite de commentaires exprimés par Stephen Harper lors de la campagne de 2004, et jamais démentis par après, au sujet de la commercialisation possible de la télé et de la deuxième chaîne de radio de CBC.
• L’ancien gouvernement libéral, de même que l’actuel gouvernement conservateur, ont tous deux étudié la possibilité de rendre les entreprises de télécommunications canadiennes plus susceptibles d’être achetées par des intérêts étrangers. Ils ont également songé à fusionner la législation sur les télécommunications et la radiodiffusion, puisque beaucoup d’entreprises médiatiques travaillent dans ces deux domaines (par exemple Rogers, Corus, Quebecor). Une telle mesure favoriserait l’acquisition de nos médias par des propriétaires étrangers, ainsi que l’élimination des règles sur le contenu canadien.
Ce que vous pouvez faire
Si vous vous prenez part à l’élection, veuillez consulter les politiques pertinentes de votre employeur au niveau des activités politiques extérieures. Il est évident que certains membres de la Guilde ne peuvent pas se permettre de jouer un rôle public ou actif lors des élections. En général, il est préférable de ne pas vous identifier à votre employeur lorsque vous participez à une campagne. Si vous désirez discuter de cela, veuillez communiquer avec nous.
Voici des questions que vous pouvez poser aux candidats de votre circonscription, soit à la porte, à l’occasion de forums des candidats, dans des blogues ou dans des lettres ouvertes :
– Êtes-vous d’accord avec le maintien de règles qui limitent la propriété étrangère dans nos entreprises médiatiques ?
– Appuyez-vous une Société Radio-Canada forte et indépendante et, s’il est élu, est-ce que votre gouvernement augmentera la subvention parlementaire de Radio-Canada ?
– Appuierez-vous de nouvelles règles assurant que les diffuseurs produisent et diffusent des bulletins de nouvelles locales ?
Si vous apprenez des renseignements sur les positions prises par vos candidats locaux au niveau des enjeux culturels et médiatiques, veuillez nous en faire part. Veuillez également communiquer avec nous si vous travaillez avec un candidat pour que nous puissions vous communiquer les plus récents renseignements au sujet des enjeux culturels et médiatiques, dont vous pourrez vous servir en campagne.
Je vous conseille également de visiter le site du Congrès du travail du Canada pour vous renseigner au sujet des enjeux que soulève le mouvement syndical pendant les élections : http://congresdutravail.ca/fr/election-2008 .
C’est à nous d’affirmer l’importance de disposer de médias indépendants appartenant à des Canadiens, d’une diffusion publique vigoureuse, et de subventionner nos travailleurs culturels et nos artistes.
Si vous avez des questions, veuillez communiquer avec nous à info@cmg.ca, ou composer le 1-800-465-4149 ou le 416-591-5333.
Lise Lareau
Présidente nationale