Le débat sur nos factures de téléphonie cellulaire comporte plus d’enjeux qu’il n’y paraît et les Canadiens méritent mieux que de belles paroles sur la valeur de la concurrence ou les dangers de la prise de contrôle par des intérêts étrangers.
Nous avons besoin d’un accès au spectre dans presque tous les aspects de notre quotidien, que ce soit pour nous parler, pour nous informer ou pour travailler, ce qui revient à dire que l’utilisation du spectre joue un rôle central dans notre vie sociale, économique et politique. Mais s’il est vrai que nous avons besoin de services mobiles et sans fil abordables, nous devons aussi nous assurer que notre réseau soit à même de répondre à nos besoins futurs. Or, en raison de la rapidité des changements dans les modes de communication, il est impossible d’imaginer quels seront ces besoins.
Le gouvernement canadien s’apprête à mettre aux enchères une bande de fréquences (un spectre) d’excellente qualité et les trois principaux opérateurs de téléphonie mobile du Canada – Bell, Telus et Rogers – entendent bien se protéger des intrusions de nouveaux concurrents. Le gouvernement, conscient de la grogne des Canadiens au sujet des prix élevés des communications cellulaires et des services Internet, affirme que la solution réside dans un accroissement de la concurrence et il vient d’annoncer la mise en place de règles destinées à empêcher les trois géants des télécommunications de rafler tout le spectre. Il réserve ainsi une partie du spectre à de nouveaux opérateurs ou à de petits opérateurs, tels Wind et Mobilicity. De son côté, Verizon, une entreprise américaine de télécommunications, aurait fait des avances à Wind et Mobilicity dans le but de s’implanter au Canada. Alors que les trois géants contrôlent autour de 85 % du spectre actuellement utilisable, ils déplorent qu’en vertu des règles établies par le gouvernement, un gros opérateur étranger puisse venir s’implanter au Canada en profitant des modalités favorables aux nouveaux venus. Certains affirment pour leur part que les trois géants ne font qu’essayer de faire supprimer des règlements favorables à tous les nouveaux venus, quels qu’ils soient.
Le fait est que pour que le réseau réponde à nos besoins actuels et aux besoins de la prochaine génération, il ne suffit pas de favoriser la concurrence.
Les services municipaux, conseils de bandes, écoles, organismes publics locaux, etc. devraient avoir accès à une partie de ce spectre de qualité afin d’expérimenter et même d’offrir des services abordables, en particulier dans les zones rurales et les zones défavorisées, mal desservies par le secteur privé.
Dans notre vaste pays à faible peuplement, les services publics et communautaires ont toujours été une part essentielle du système de communication et il n’y a aucune raison de croire que cela n’est plus nécessaire, alors que les communications occupent dans notre vie une place plus importante que jamais.
Voici donc ce que nous exhortons le gouvernement à faire :
– Réserver une partie du spectre de 700 MHz (la bande de fréquences qui doit être mise aux enchères) à l’usage public, communautaire et éducatif. La Guilde canadienne des médias avait d’ailleurs déjà recommandé que deux bandes de 5 MHz soient réservées à cet effet.
– Établir des tarifs basés sur les coûts et faire appliquer les règlements relatifs au partage des pylônes, à l’itinérance et à l’accès à l’infrastructure numérique existante afin de permettre aux fournisseurs de services canadiens indépendants – qu’il s’agisse de sociétés privées ou de sociétés sans but lucratif – d’offrir de véritables alternatives aux services des gros opérateurs. Les trois géants ne devraient pas avoir la possibilité de s’arroger le rôle de chiens de garde en bloquant ou en entravant l’accès aux routes numériques que doivent emprunter les fournisseurs de télécommunications pour servir les Canadiens.
La Guilde canadienne des médias compte 6 000 journalistes, animateurs, réalisateurs, techniciens, rédacteurs, vidéastes, médiathécaires, programmeurs, représentants aux ventes, employés administratif et collaborateurs à la pige. Nous croyons qu’un système médiatique de qualité qui répond aux attentes des Canadiens repose sur des organisations en santé qui traitent les employés de manière équitable.