Permettez-moi tout d’abord de souligner, depuis mon bureau de Toronto où j’écris ces lignes, au siège social de la Guilde, que nous nous trouvons sur les territoires traditionnels des Mississaugas de Credit, des Hurons-Wendats, des Anichinabés et des Haudenosaunees.
Alors que s’achève une autre année passée à trouver de nouveaux repères dans notre vie professionnelle comme dans notre vie personnelle, au sein d’un monde marqué par la pandémie continue de COVID-19, j’aimerais commencer par relater certaines des difficultés rencontrées par les membres de la Guilde au cours de cette période éprouvante.
En raison de la crise sanitaire, bon nombre de membres ont fait face à de graves difficultés financières causées par un accroissement de la précarité, notamment par suite de la perte d’emplois à plein temps – un nombre croissant d’emplois dans les médias étant devenus temporaires.
Les membres qui ont conservé leur emploi l’exercent dans des conditions plus difficiles, qu’il s’agisse de travailler à domicile avec des responsabilités familiales accrues ou d’avoir à prendre des précautions supplémentaires pour assurer leur sécurité personnelle au bureau ou sur le terrain – avec les masques, la distanciation physique et les autres mesures de précaution. Nombreux sont ceux qui ont dû s’adapter à des horaires sans cesse changeants, avec le stress que cela implique.
Pour un grand nombre de travailleuses et travailleurs des médias, en particulier les femmes ainsi que les journalistes de couleur, les violentes attaques publiques via le courrier électronique et les médias sociaux ont été une source supplémentaire de détresse.
En dépit de ces circonstances, les membres de la Guilde ont travaillé sans relâche pour continuer d’informer le public en lui fournissant des informations fiables et de qualité.
En ces temps inhabituels, notre contribution en tant que travailleuses et travailleurs des médias est vitale et nous avons tout lieu de nous féliciter de notre travail.
Personnellement, j’ai trouvé encourageant de voir les multiples façons dont les collègues se sont entraidé·e·s et ont collectivement ouvert de nouvelles avenues.
Pendant la pandémie, les syndicats du Canada ont lutté sans relâche pour que la santé et la sécurité restent au premier plan. La Guilde continue d’œuvrer auprès du patronat pour promouvoir des modalités de travail flexibles, l’accès en temps opportun aux outils nécessaires pour travailler à distance en toute sécurité, et des aménagements en cas de besoin. L’année écoulée nous a montré que divers modèles de travail alternatifs pouvaient être avantageux tant pour les entreprises que pour les travailleuses et travailleurs.
En même temps, notre syndicat a continué à se porter à plaider en faveur de politiques de financement qui garantissent une radiodiffusion publique et des médias d’information forts au pays.
En 2021, malgré les restrictions en matière de déplacements, nous avons également eu l’occasion d’échanger des idées lors du premier congrès virtuel de la Guilde. Deux cents délégué·e·s se sont réuni·e·s pour définir les priorités du syndicat – santé et sécurité, sécurité d’emploi, lutte contre le travail précaire et le racisme systémique – et discuter de la nécessité d’obtenir de meilleurs aménagements en lien avec la santé mentale ainsi que des modalités de travail flexibles, avec une compensation financière pour les frais encourus dans le cadre du travail à domicile.
Perspectives d’avenir
Pour la prochaine phase du travail, quelle qu’en soit la forme, la Guilde continuera de veiller à la protection de votre santé et de votre sécurité et au respect de vos droits. Nous poursuivrons également notre travail de représentation au nom des membres.
Une tendance à laquelle nous voulons mettre fin est la diminution des emplois permanents et l’augmentation subséquente des emplois temporaires. Dans beaucoup de salles de rédaction, un grand nombre de professionnel·le·s des médias sont cantonné·e·s à des postes temporaires, une situation qui est source d’insécurité économique et qui nous nuit à tou·te·s, ainsi qu’à notre industrie, et ce, à plusieurs égards.
En particulier, il apparaît de plus en plus clairement qu’un nombre disproportionné de travailleuses et travailleurs des médias issu·e·s de la diversité occupent des emplois temporaires. Une récente enquête de l’Association canadienne des journalistes (ACJ) sur la diversité (en anglais) indique que le nombre de journalistes non Blanc·he·s qui travaillent à temps plein est inférieur à celui de leurs collègues Blanc·he·s. L’enquête brosse un tableau peu reluisant du secteur quant à sa capacité à embaucher ou à conserver du personnel issu de la diversité. Parmi les résultats : 50 % des salles de rédaction canadiennes sont presque exclusivement composées de personnes blanches et huit sur dix n’emploient pas un·e seul·e journaliste noir·e ou autochtone – à quoi vient s’ajouter le fait que les employeurs surestiment la diversité dans leurs salles de rédaction.
Nous sommes reconnaissant·e·s à nos collègues qui ont fait preuve d’un leadership remarquable en en témoignant de leur expérience sur la question.
Il ne fait toutefois aucun doute qu’il nous reste encore beaucoup de pain sur la planche.
La Guilde continue d’exercer des pressions auprès des employeurs pour qu’ils fournissent des données exactes sur la diversité, car nous savons bien que la transparence est une étape nécessaire à l’instauration de véritables changements et à la responsabilisation.
Conformément à l’engagement de la Guilde à l’égard de la lutte contre le racisme, le syndicat a rendu obligatoire la formation de tous les bénévoles à ce sujet, notamment en ce qui concerne les préjugés inconscients. Cette formation vise à donner à toutes les personnes concernées les moyens de contribuer à faire régner, au sein de nos lieux de travail, l’équité et la convivialité auxquelles tout le monde est en droit de s’attendre. À ce jour, plusieurs centaines de personnes ont suivi cette formation. Cette initiative s’inscrit d’ailleurs dans l’esprit du rapport de la Commission de vérité et réconciliation, qui souligne le rôle essentiel des médias en matière de réconciliation.
Il reste encore beaucoup à faire. Mais l’union fait la force et je suis persuadée qu’avec la collaboration de toutes et de tous, la Guilde continuera à être un syndicat actif, progressiste et attentif aux besoins de tous ses membres.
En toute solidarité
et avec mes meilleurs vœux de fin d’année,
Carmel Smyth
Journaliste primée, Carmel Smyth est journaliste /réalisatrice de longue date à CBC Television. Elle a été présidente de la Guilde de 2010 à 2016 et elle occupe de nouveau cette fonction depuis 2019.