La Société Radio-Canada a reculé sur l’adoption d’un nouveau code de conduite qui avait fait grincer des dents les artisans de la SRC, le syndicat et la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ).
Dans un mémo interne, repris dans Le Devoir, le président-directeur général Hubert Lacroix écrit :
« […] Nous constatons que l’enjeu a suscité de nombreuses réactions de la part de nos journalistes, des médias, de la communauté journalistique en général ainsi que de la population. Afin qu’il n’existe aucun doute sur l’indépendance dont jouissent nos employés et la Société, nous allons ajuster le Code de conduite pour écarter toute ambiguïté à cet égard. Les modifications proposées feront aussi l’objet d’une communication explicite ultérieurement. »
Cette réaction épidermique était liée au nouveau Code de conduite des employés, que des organisations ont qualifié de serment d’allégence politique.
L’article en cause, le 1.2, se lisait comme suit:
Les employés «exécutent avec loyauté les décisions prises par leurs dirigeants conformément à la loi et aident les ministres à rendre compte au Parlement et à la population canadienne».
Ces règles, forcément, visaient aussi les journalistes.
Hubert Lacroix estime que la directive a été mal interprétée, surtout puisqu’elle a été précédée par une condition, soit : «sous réserve de la Loi sur la radiodiffusion», qui prévoit l’indépendance de la Société en ce qui a trait à la programmation. Le code sera néanmoins révisé.
La
FPJQ y voyait une atteinte à l’indépendance journalistique et s’interrogeait sur le choix délibéré du mot «aider», refusant de voir le diffuseur public glisser vers un État où la SRC ne serait réduite qu’à devenir un organe au service du gouvernement.
Pour sa part, syndicat des communications de Radio-Canada (SCRC) avait incité ses membres à ne pas signer le code.
L’indépendance de Radio-Canada n’en est pas à sa première menace. Plusieurs autres épisodes du genre se sont succédés dans l’histoire du diffuseur public.
En 1990, le projet de loi C-40, présenté par le parti conservateur souhaitait amender le mandat de la SRC. Cet épisode est notamment repris dans le livre «Radioscopie de l’information télévisée au Canada» Le ministre des communications d’alors, Marcel Masse, avait fait retirer l’obligation de «promouvoir l’unité canadienne». Selon lui, il s’agissait d’une «obligation qui ouvrait la porte à une ingérence intolérable».
Plus antérieurement encore, des gouvernements libéraux ont demandé à Radio-Canada des comptes sur le nombre de séparatistes qui assuraient ou non la promotion de l’unité canadienne.
Il faut noter d’ailleurs qu’en 1968 la Loi sur la radiodiffusion imposait à la SRC de «contribuer au développement de l’unité nationale et d’exprimer constamment la réalité canadienne».
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Lise Millette est journaliste à La Presse Canadienne et membre de la Guilde canadienne des médias.