Par la blogueuse invitée Lise Lareau
Quand viendra le temps de suivre sur CBC – ce que nombre de gens feront – les résultats des élections passionnantes de l’Alberta mardi prochain, il faudra se rappeler que presque chaque vidéographe travaillant sur l’émission a un avis de mise à pied dans sa poche.
Pour des raisons peu claires, la direction de CBC/Radio-Canada a décidé de cibler les gens de première ligne en ce qui a trait à la collecte de nouvelles dans la prochaine série de mises à pied. Près de 40 sur les 241 postes éliminés dans les mises à pied actuelles sont des vidéographes. Plus curieux encore, chaque vidéographe en Alberta a eu un avis de congédiement.
Quelle sorte de stratégie pourrait bien expliquer l’abandon de tous tes vidéographes ? Le soi-disant « mobile d’abord » ? Pas sûr, puisque ces personnes recueillent les nouvelles pour les QUATRE plateformes : ils filment les vidéos, obtiennent l’audio, et leur travail est vu et entendu sur votre appareil mobile, vos sites de nouvelles numériques, à la radio et à la télé. Ils comptent parmi les meilleurs représentants de première ligne de CBC/Radio-Canada, qui parlent au public – que ce soit la police lors d’une manifestation, la famille de la victime d’un meurtre, les enfants lors d’un défilé. Ce sont des bourreaux de travail fiables dans les circonstances les plus difficiles, qui marchent dans la boue ou la neige fondante, ou escaladent une colline pour filmer une scène, s’approchent des incendies, filment de terribles accidents, se fraient un chemin dans la circulation pour respecter l’heure de tombée chaque jour. Ils gèlent, transpirent et sont trempés en attendant la « bonne prise ». Ce sont eux les yeux et les oreilles du journalisme, et souvent ses muscles aussi.
Bien entendu, aucun avis de mise à pied ne devrait être remis à qui que ce soit. La CBC/Radio-Canada de l’avenir aura toujours besoin des personnes dévouées qui font le travail sur lequel comptent les Canadiens.
S’attaquer aux vidéographes c’est comme s’attaquer à nous tous. C’est s’attaquer à nous tous. Cela nuira à toutes les plateformes de CBC/Radio-Canada. Les organisations de nouvelles qui sont considérées comme étant les chefs de file de notre industrie à l’heure actuelle – Guardian, BBC, New York Times – ont toutes des vidéos superbement filmées sur leur site – ce n’est pas quelque chose à laquelle on pense après coup. La vidéo est loin d’être ringarde. Ce qui est ringard, c’est l’idée que la vidéo est ringarde.
Perdre toutes ces vidéos est surtout mauvais pour la plateforme qui devra bientôt être compétitive dans l’environnement implacable de la soi-disant télévision à la carte. Il ne faut pas amputer notre capacité de production télé et notre capacité de production vidéo.
La Guilde va se battre fort pour veiller à ce que les vidéographes aient la formation et l’aide requises afin qu’il puissent se porter candidats aux postes nouvellement créés de vidéo-journalistes et de réalisateurs vidéo. Mais il n’y a pas suffisamment de postes pour toutes les personnes visées par les mises à pied, ou simplement pour faire le travail. C’est en encore une fois la dilution de notre capacité globale. C’est la diminution de la programmation qui est au coeur de notre travail. Et c’est un coup de pied en guise d’au revoir à des gens e qui ont servi pendant des années dans les tranchées – souvent littéralement – et dont on a encore besoin.
Si vous êtes vidéographe, racontez-nous votre histoire. Si vous avez une histoire de vidéographe que vous vous aimeriez partager, nous vous invitons à le faire – (info@cmg.ca)
Lise Lareau est la vice-présidente nationale de la Guilde canadienne des médias (lise@cmg.ca)