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Pourquoi le Canada a besoin de CBC/Radio-Canada plus que jamais : Tony Burman

Au terme d’une brillante carrière de reporter, au cours de laquelle il a été successivement chef de la division des nouvelles pour CBC, chef de la division des nouvelles pour Al Jazeera en anglais, puis chercheur invité dans le cadre du programme de journalisme de l’Université Ryerson, Tony Burman continue d’être un partisan du rôle de la radiodiffusion publique et de CBC/Radio-Canada.

Dans une récente intervention lors du débat du 8 juin 2015 de l’institut CD Howe sur l’avenir de la radiodiffusion publique et des médias publics au Canada, T. Burman a expliqué pourquoi le Canada avait plus que jamais besoin de Radio-Canada.

Vous trouverez  ci-dessous un aperçu de ses propos pénétrants ainsi que la vidéo de l’intégralité du débat.

Carmel Smyth,
présidente nationale de la Guilde

Tony Burman June 8 2015Tony Burman

Il y a près de huit ans que j’ai cessé de travailler à CBC.

J’y ai passé une trentaine d’années à divers titres et dans divers pays.

Toute imparfaite qu’ait pu être la qualité de mon travail, j’étais fier d’œuvrer pour le radiodiffuseur public du Canada. Nous avions l’impression de participer, dans une certaine mesure et de façon un peu désordonnée, à l’édification d’une nation.

Avec le recul, ce dont je me souviens tout particulièrement, c’est de mes collègues de CBC : de ces hommes et de ces femmes passionnés, passionnants et parfois excentriques, mais toujours pleins d’amour pour leur métier, qui étaient mes compagnons de travail et dont un grand nombre devinrent des amis. Affichaient-ils souvent une certaine suffisance ? Certes, mais, je dois avouer que leur suffisance n’était pas pire que la mienne.

Après avoir quitté CBC, j’ai vécu à l’tranger . J’ai d’abord passé quatre ans au Proche-Orient, puis j’ai passé un an à Washington, à Al Jazeera English. Ça m’a permis de prendre vraiment conscience de l’impact culturel des médias publics à l’échelle internationale.

Voilà quatre ans que je suis de retour au Canada, et en tant qu’enseignant à temps partiel à l’école de journalisme de l’Université Ryerson, j’ai beaucoup appris sur la façon dont les jeunes d’aujourd’hui utilisent les médias.

Depuis mon retour, je dois dire que j’ai essayé d’éviter de prendre part au débat sur CBC/Radio-Canada, en me disant qu’il était temps de céder la place aux autres. Alors, mon intervention d’aujourd’hui est un peu hors-norme pour moi.

Néanmoins, ce qui me frappe à propos du débat actuel, c’est qu’il ne s’agit pas réellement de CBC/Radio-Canada, avec tout le drame que cela comporte.

C’est bien plus important que cela.

Ce qui est en jeu, c’est la direction que le Canada prendra en ce XXIe siècle où les frontières s’estompent de plus en plus. C’est la manière dont nous Canadiens découvrirons, sur nos chaînes de télévision et nos stations de radio et dans nos médias numériques, ce que nous sommes et notre place dans le monde, à travers nos expériences, nos drames, nos comédies, notre scène artistique, et notre journalisme.

Le fait de travailler à l’étranger a renforcé ma conviction qu’il ne faut rien prendre pour acquis dans ce monde plein de dangers. Les cultures vivent et elles meurent, les pays vivent et ils meurent.

La différence entre ces deux issues – ce qui vit et ce qui meurt – est souvent très simple. Sait-on ce qu’on veut ? Est-on prêt à se donner les moyens d’y parvenir ?

Si on baisse les bras, l’issue est claire. On n’a qu’à attendre que les lumières s’éteignent et passer à autre chose.

Et il ne s’agit pas d’une opinion personnelle.

Pour moi, le fait de revenir au Canada après avoir vécu à l’étranger a été une véritable révélation. Avec le recul, tout paraît plus clair.

Alors, pendant que j’ai les yeux bien ouverts, je voudrais énoncer trois principes de base en guise d’introduction à ce débat.

En premier lieu – À aucun moment de l’histoire du Canada, les médias publics et la radiodiffusion publique n’ont été aussi nécessaires.

Ne nous y trompons pas. Il se pourrait bien que l’histoire se souvienne de nous comme de la génération qui a abandonné ce pays. Dans ce monde globalisé, ce sont en grande partie les médias culturels américains qui définissent le monde pour les jeunes Canadiens.

Notre spécificité et notre journalisme sont en train d’être évincés du marché. Nous avons l’un des systèmes médiatiques publics les plus sous-financés au monde. Le Canada consacre à la radiodiffusion publique autour de 33 dollars par habitant et par an, ce qui est une des contributions les plus basses du monde.

Pourtant, tous les sondages effectués ont révélé que la majorité des Canadiens souhaitaient un radiodiffuseur public robuste et qu’ils étaient prêts à payer davantage pour l’appuyer.

En deuxième lieu – Jamais au Canada la radiodiffusion publique n’a été menacée à ce point.

Depuis 1985, le total des dépenses publiquess’est accru de quelque 50 %, alors que durant la même période, le financement de Radio-Canada a été amputé des deux tiers.

Sans tambour ni trompette, d’un bout à l’autre du Canada, coupe après coupe, le radiodiffuseur public du pays est en train d’être détruit.

Et la lâche complicité de la haute direction de Radio-Canada ne fait qu’aggraver les choses.

Son président et son conseil d’administration, dont le seul titre de compétence est d’être des donateurs au Parti conservateur, ont trahi la confiance du public en effectuant ces coupes dans un silence quasi complet.

En troisième lieu – Au Canada, la pièce maîtresse d’un système médiatique public du XXIe siècle devrait être un CBC/Radio-Canada robuste, indépendant, bien financé et bien géré.

Le Canada n’a pas besoin d’une pâle imitation de ses rivaux commerciaux. Ce dont il a besoin, c’est d’un radiodiffuseur public robuste et sans publicité offrant aux Canadiens ce qu’ils souhaitent et ce dont ils ont besoin : à savoir des émissions de nouvelles et d’affaires publiques et du journalisme documentaire qui sortent des sentiers battus, et des dramatiques et des émissions de variétés spécifiquement canadiennes.

Je conclurai sur cette remarque :

En vue de ce débat, j’ai cherché, chez nos dirigeants politiques, un éclairage original sur la question. Après tout, ce sont eux qui tirent les ficelles. Je me demandais s’il y avait quelqu’un qui comprenait vraiment la situation, qui avait conscience des enjeux et qui semblait prêt à prendre les mesures nécessaires.

Eh bien, voilà ce que j’ai fini par trouver dans mes dossiers. Ça vient d’un éminent politicien canadien. Dans un discours, il s’adressait à Radio-Canada à propos de son rôle unique de radiodiffuseur public.

Radio-Canada, disait-il, devait « s’efforcer de réduire ou d’éliminer la programmation américaine de masse et de réduire sa dépendance à l’égard des revenus de la publicité ».

Et j’apprécie particulièrement sa conclusion : « À l’évidence, ce recentrage de Radio-Canada dépendra d’un financement public stable et à long terme ».

Cette déclaration, en date du 29 novembre 2004, est de Stephen Harper.

Tony Burman June 8 2015 - debateComme j’ai passé pas mal de temps au Proche-Orient, je pose la question : Qu’est-il advenu de ce politicien ?

 

 

 

Regarder l’intégralité du débat (mot de passe: peter)

 

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