Au cours de la dernière année, les compressions les plus paralysantes et les plus inutiles imposées à CBC/Radio-Canada ont poussé de plus en plus de Canadiens à exprimer leur indignation publiquement.
Vous avez vu plus de manchettes et d’articles de presse portant sur l’avenir, l’importance et le financement de Radio-Canada, ainsi que davantage de discussions politiques, dont l’appel des Libéraux, du NDP et des Verts au niveau fédéral exigeant l’arrêt des compressions, l’augmentation du financement et le changement de la manière dont les membres du conseil d’administration de Radio-Canada sont nommés.
De l’avis de nombreuses personnes, un tel changement structurel qui aurait dû être effectué depuis longtemps empêcherait à n’importe quel-le premier-ère ministre de nommer de manière arbitraire au Conseil d’administration qui dirige Radio-Canada des partisans reconnus . À l’heure actuelle, on sait que presque tous les membres du Conseil d’administration de Radio-Canada ont versé une contribution financière au parti Conservateur.
Ce potentiel d’ingérence politique et ses répercussions corrosives pour la plus importante organisation de presse au Canada ont fait l’objet de nombreux articles d’opinion et courrier des lecteurs (http://www.lapresse.ca/arts/medias/201407/15/01-4784135-dex-membres-du-ca-de-radio-canada-sinquietent.php)
C’était également le sujet d’un récent panel à l’Institut C.D. Howe, durant lequel le bien-fondé de la radiodiffusion publique ainsi que la protection des espaces de radiodiffusion et en ligne pour l’intérêt public étaient débattus.
L’avocat spécialiste et défenseur des médias, Peter Miller a déploré la perte de la capacité de production soulignant qu’à l’heure où les réseaux privés sont de moins en moins en mesure d’offrir de la programmation axée sur le bien public, CBC/Radio-Canada devient encore plus important que jamais. Pour lui, « si nous croyons en un pays appelé le Canada, nous devons croire en un espace public et en des médias publics pour le Canada ». Il a également fait valoir la nécessité d’une plus grande réglementation visant à assurer un espace public et privé pour le Canada en ligne. Selon M. Miller, nous devons nous pencher sur les enjeux entourant Internet et examiner les outils réglementaires à notre disposition tout en promouvant et en finançant la programmation canadienne.
Le spécialiste de la radiodiffusion de longue date et ancien chef de production, Nouvelles à CBC Tony Burman, également panéliste au débat, a déploré l’emprise de la programmation américaine sur le Canada. Il a expliqué que « les histoires canadiennes sont étouffées à la naissance. Dans ce contexte, comment pouvons-nous obtenir accès au contenu canadien dans un système où les dés sont pipés? ». M. Burman a exhorté les Canadiens à se rappeler que chaque autre pays développé s’est doté d’une plus grande protection du contenu national, notamment le Royaume-Uni et l’Allemagne qui se sont dotés « d’une protection énergique pour les systèmes publics. Si nous n’appuyons pas et ne finançons pas la programmation locale, tout l’argent va aux États-Unis. Est-ce cela que nous souhaitons ? »
M. Miller a tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas d’exclure la programmation américaine, mais bien de promouvoir la programmation canadienne, soulignant ce que tous ceux qui travaillent dans les médias savent bien: « La programmation locale et la diversité des voix dans nos collectivités font face à un risque accru, ce qui a pour résultat entre autres de diminuer la capacité pour les jeunes de trouver du travail dans cette industrie. »
Ce sont là des enjeux importants pour ceux d’entre nous qui connaissent l’immense valeur de médias dynamiques pour le Canada. Si vous êtes également fiers de l’unique capacité du Canada à partager ses propres histoires et ses propres valeurs, nous vous invitons à partager votre opinion avec nous et avec tout le monde. Continuons la conversation en cette année électorale.
Vous trouverez ci-dessous un aperçu des propos de M. Miller ainsi que la vidéo de l’intégralité du débat.
Carmel Smyth,
présidente nationale de la Guilde
Merci Anne, et merci de m’avoir invité. Je n’ai pas habituellement l’occasion de m’adresser à un si prestigieux public, et ce n’est pas comme ça que je m’habille normalement. En fait, je travaille surtout dans le milieu des médias numériques et je suis habituellement en shorts et jeans et parfois une veste en coton gaufré. J’ai donc décidé de ne pas vous infliger cela. Je porte une cravate orange en en honneur à un prochain gouvernement Mulcair.
Alors pourquoi est-ce que je suis là ?
Je n’ai jamais travaillé pour CBC/Radio-Canada, j’ai fait ma carrière en radiodiffusion privée. Je suis ingénieur et avocat. Je ne suis pas sûr pourquoi je me trouve de ce côté-ci du débat avec Tony [Burman], mais voilà, c’est là où je suis.
Et j’y suis pour trois raisons dont j’aimerais parler. Elles mettent en relief à mon point de vue la réponse à la questions du débat.
La première question est très simple : Le système canadien de radiodiffusion est le résultat d’une volonté politique. Il n’a aucune raison économique d’exister. Il existe parce que quelqu’un à tracé quelques limites et élaboré des lois, exactement de la même manière dont le Canada comme pays existe. C’est aussi simple que cela. Alors, si on parle de radiodiffusion, si on parle de l’avenir de la radiodiffusion, on ne peut pas parler de rien d’autre que la question de savoir s’il existe la volonté politique de le maintenir en vie. C’est aussi simple et tout aussi alarmant que cela. Parce que ce n’est pas une question technologie. Je suis ingénieur, une grande partie de mon travail concerne la technologie et je peux vous dire que ce n’est pas une question de technologie. C’est une question de volonté politique.
Le deuxième point que je veux soulever est que les changement que nous observons, les changements évoqués par Anne, les changements qui se dessinent à l’horizon rendent la radiodiffusion publique et CBC/Radio-Canada encore plus importants, pas l’inverse. CBC/Radio-Canada devient encore plus important et pas l’inverse.
Pourquoi est-ce le cas ?
Parce que le système canadien de radiodiffusion a toujours été un système mixte public et privé, et le génie de ce système et que l’on avait le côté public, CBC/Radio-Canada, puis on avait le côté privé réglementé. Et la contrepartie pour le côté privé était qu’en échange de la protection du marché et divers autres avantages, les diffuseurs privés fournissaient certaines qualités de l’espace public, soit les nouvelles locales, ou encore des dramatiques et autres – certainement bien plus qu’ils ne seraient autrement en mesure d’offrir sans la réglementation ou la protection offerte par la réglementation.
Et bien, je ne surprends personne en disant que cela est n cours de désintégration.
Alors, cet aspect, l’aspect privé, sera désormais moins en mesure de fournir le bien public que par le passé. Ainsi, même si nous ne faisons rien à CBC/Radio-Canada, rien qu’en termes relatifs, il devient plus important.
Troisièmement – Et c’est la question de la subvention par rapport à la réglementation. La subvention est ce qui appuie CBC/Radio-Canada au moyen du crédit parlementaire, la subvention appuie les dramatiques canadiennes au moyen de quelque chose qui s’appelle le Fonds canadien des médias et par divers autres crédits d’impôts, la subvention est très importante.
Cependant, la subvention n’est pas le grand moteur du système canadien de radiodiffusion.
Le grand moteur de système canadien de radiodiffusion en termes du bien public qu’il fournit en retour est au moyen de la réglementation. La grande question devient alors, qu’arrive-t-il avec la réglementation à l’avenir ?
Vous allez tous instinctivement être en désaccord avec ce troisième point mais je vais le dire quand même : Nous devons nous pencher sur les enjeux entourant Internet. Nous devons nous pencher sur la question de savoir s’il y a certains outils réglementaires que nous pourrions commencer à utiliser. Non pas de la réglementation à l’ancienne où on interdit aux Canadiens d’accéder à du contenu, mais un nouveau type de réglementation où on crée un environnement qui fait la promotion de la programmation canadienne et finance la programmation canadienne.
Et aussi choquant que cela puisse paraître, au ca où vous n’auriez pas remaqué Internet est en réalité réglementé.
Le gouvernement Harper dans la Stratégie numérique qui a été annoncé l’an dernier énumère environ 15 choses se rapportant à la vie privée, la protection des mineurs contre la pornographie infantile et diverses autres mesures qui constituent une réglementation d’Internet.
La question n’est donc pas de savoir si oui ou non nous réglementons Internet. Il s’agit de savoir nous choisissons de le reglementer, aussi, pour l’espace média public et la radiodiffusion.
Je vais conclure – et j’ai averti Andrew [Coyne] que j’allais le faire – par une remarque qu’il a faite récemment en citant le mot de Kim Campbell qui avait que les élections ne sont pas le moment pour parler de politiques publiques; dans son article, Andrew disait que cela n’est plus le cas, étant donné les campagnes électorales interminables. Pour le coup, sur ce point question, j’espère bien qu’Andrew a raison, car nous avons besoin de ce débat. Il est important. Et je pense que pour ceux d’entre nous qui croyons en un pays appelé le Canada, il faut croire en un espace public et des médias pour le Canada
Regarder l’intégralité du débat (mot de passe: peter)